Jean-François Perigot, réalisateur - Films documentaires - Retour en page documentaires


 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Voyageurs amoureux des baleines.

Dans la série "Voyageurs des mers froides"

Film documentaire de 26'

Réalisation, montage et texte : J.F. Perigot
Production : Morgane production. 2001
Diffusé sur Voyage


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Film disponible sur

Observer les baleines, c'est comme vouloir percer un secret : le secret des plus grands mammifères que notre planète ait jamais portés. Après les avoir longtemps massacrées sans les connaître, les hommes s'intéressent enfin aux baleines. Il aura fallu le moratoire adopté, au début des années 80, par la Commission baleinière internationale pour qu'enfin elles soient protégées. Partir en mer observer ces grands cétacés garantit des rencontres inoubliables. Humilité et discrétion sont les règles à observer pour que cela ait lieu. L'approche de ces animaux marins provoque alors une émotion irremplaçable. A partir des années 80, le tourisme écologique connaît une croissance considérable : il est tourné avant tout vers les grands cétacés tout en s'intéressant également aux petits lorsqu'ils sont observables de manière prévisible. Il existe une quinzaine de territoires - y compris l'Antarctique - où les grands cétacés peuvent être approchés. La péninsule de Valdés en Argentine est l'un de ces territoires. Les mammifères marins remontent le long des côtes atlantiques jusqu'au nord de la Patagonie, à la péninsule de Valdés qui leur doit ainsi sa renommée. Ce sont des baleines franches australes qui arrivent chaque année à partir de mai, au début de l'hiver austral, pour mettre bas dans les eaux claires du golfe. En Argentine, elles sont déclarées "monument national" et ne sont plus que 4000 de cette espèce au monde. Les scientifiques de la région continuent leur travail de recensement, entrepris ces dernières décennies, pour mieux les étudier et les guides locaux partagent leur fascination pour les baleines en les faisant découvrir aux touristes...

"L'une des idées les plus folles qui hantaient les esprits superstitieux au sujet de la Baleine Blanche était la notion surnaturelle de son ubiquité, elle aurait été réellement rencontrée au même instant précis sous deux latitudes opposées"

Moby Dick - Herman Melville

 

Synopsis

L'océan s'étend à perte de vue sous le soleil. Tout est calme. L'attente dure. Soudain, à bâbord, on sent une présence. On retient sa respiration. La tête d'une baleine émerge à peine, une masse grise se soulève, arquée. Puis, la nageoire caudale se dresse hors de l'eau pour plonger et disparaître dans l'eau. Cela se reproduit plusieurs fois en quelques minutes. La baleine saute et retombe sur le dos. Ses larges nageoires pectorales s'exhibent au dessus de l'eau. C'est la première rencontre avec une baleine franche australe, eubalaena australis pour les scientifiques. Très démonstrative et joueuse, elle est loin de l'image de Moby Dick, la Baleine Blanche du roman d'Herman Melville contre laquelle le capitaine Achab livre un combat sans merci.

Nous sommes sur la bordure méridionale de la péninsule de Valdés où se dresse le petit port de Puerto Piramides aux maisons chaulées de blanc et rehaussées de toits rouges. Alentour, tout n'est que paysages de roches, de plages de graviers et de falaises. C'est le point de départ des excursions vers le Golfo Nuevo pour l'observation des baleines. Dès le mois d'août, le tourisme écologique reprend. Environ 10 000 touristes viennent chaque année aux rendez-vous des baleines et, 80 % d'entre eux sont européens et américains.

Oscar Alacran, le guide des baleines le plus connu de Valdés, conduit un groupe de touristes venus à la rencontre des grands mammifères marins. Oscar Alacran explique que les baleines passent l'été à écumer les eaux antarctiques pour se constituer des réserves alimentaires. Elles viennent se reproduire dans les eaux peu profondes des baies favorisées par un courant chaud venant du Brésil. Ces mouvements migratoires se font selon des routes bien précises et se répètent chaque année à la même saison. La reproduction est le point d'orgue de la vie des baleines.

C'est ainsi qu'à la péninsule de Valdés, chaque site est le lieu de rendez-vous précis : le Golfe Nuevo est réservé à l'accouplement, la Caleta Valdés, étroite et bien protégée, est propice à la mise à bas et enfin, le Golfe San José accueille les baleines et leurs baleineaux. Partir en mer avec une personne compétente est indispensable et Oscar Alacran en est une, assurément. Et cela, pour des questions de sécurité mais aussi pour les connaissances qu'elle peut apporter. Ainsi, aucune incursion non accompagnée n'est possible dans les sites de mise bas comme la Caleta de Valdés. Et, Oscar Alacran rappelle qu'il ne faut jamais poursuivre les baleines, rester à distance, ne pas leur couper la route. Car même si elles sont inoffensives, voire même accueillantes, elles demeurent impressionnantes par leur taille et leur poids.

Exploitée de tout temps par l'homme, la baleine devient victime de la chasse moderne à la fin du XIXème siècle-début du XXème. Le nombre de baleines franches décroît considérablement. Aujourd'hui, 4 à 600 d'entre elles viennent aux rendez-vous de Valdés.

Oscar Alacran est une figure de Puerto Piramides. De retour de l'excursion, on apprend qu'il y a quinze ans maintenant qu'Oscar Alacran a commencé à servir de guide aux touristes. Même s'il dirige aujourd'hui une ligne de bus collectifs, il ne manque pas ces sorties en mer car, confie-t-il, les baleines le fascinent encore tout autant. C'est que les baleines gardent encore leurs mystères où se mêlent crédulité et superstition. Elles ont bien pour ancêtres des mammifères terrestres retournés vivre dans la mer. Au cours des millénaires, elles ont donc été transformées par le milieu marin sans perdre leurs caractéristiques d'animaux terrestres : sang chaud, poumons, viviparité, mamelles. Mais, même pour les scientifiques, la connaissance des baleines est encore fragmentaire. C'est sans doute pourquoi, ajoute Oscar Alacran, elles sont au coeur de tant de légendes et de mythologies, notamment chez les Inuits.

Pour mieux les connaître, les scientifiques argentins ont entrepris depuis plusieurs années un travail de photo-identification des baleines. Comme l'explique I. Kerr, Directeur du programme de recherche du Golfe de San José, il s'agit de photographier toutes les baleines qui y séjournent : profil de la tête et nageoire caudale. Leurs callosités permettent de les distinguer les unes des autres. Les baleines émettent des sons dit "émotionnels". Des appareils appelés hydrophones les enregistrent et déterminent s'il s'agit de mâle ou de femelle, si l'animal nage ou joue.

A la base scientifique, les milliers de données informatiques permettent de dresser une fiche d'identité de l'animal : âge, sexe et habitudes migratoires. L'accumulation patiente de ces observations et de ces données permettent d'en savoir un peu plus sur l'animal le plus inaccessible de la planète et ses mystères. Ainsi, l'on sait que, deux fois par an, les baleines effectuent plusieurs milliers de kilomètres, au large des côtes, selon l'hémisphère et l'océan où elles sont nées. Elles séjournent en eaux froides ou polaires pour se nourrir et regagnent des eaux plus chaudes pour mettre bas. Et cela, depuis des millénaires, pour la survie de l'espèce... Par ailleurs, le site de Valdés présente un écosystème unique et recèle des richesses - sur le plan de la faune, de la flore, de la géologie - qui suscitent l'attrait des touristes épris de nature.

Dans le Golfe de San José, l'Ile-aux-oiseaux, située au nord de Puerto Piramides est classée réserve provinciale pour sa faune, donc interdite au public. Avec de puissantes lunettes, il est cependant possible d'observer cormorans et goélands, canards et autres oiseaux qui s'y reproduisent. A l'extrémité de la péninsule, à Punta Norte, on peut voir orques et éléphants de mer qui s'ébattent dans l'eau. Dès le mois de juillet, les éléphants de mer mâles - grands phoques de 6 mètres de long - s'affrontent en combats violents pour s'octroyer les meilleurs territoires afin d'y accueillir les femelles.

En longeant l'extrémité de la péninsule de Valdés, l'anse de Valdés est l'une des régions les plus riches en faune : manchots de magellan et flamants s'y côtoient. Vers Punta Delgada, des lions de mer australs, sortes de grandes otaries, ont colonisé le pied des falaises. Et, tandis que les touristes sont partis à la découverte de cette faune riche et variée, Oscar Alacran observe l'horizon. La mer scintille et quelques dos sombres affleurent non loin du rivage. Une demi-douzaine de voiles sombres semblent s'immobiliser au large. Ce sont les nageoires caudales des baleines qui se balancent doucement au-dessus de l'eau. Les baleines "font le poirier", la tête enfouie dans le fond sableux à une dizaine de mètres de profondeur. Que font-elles ? Selon les scientifiques, elles cherchent quelque organisme pour s'alimenter. Pour d'autres, elles se reposent. Pour Oscar Alacran, elles jouent tout simplement, pour le seul plaisir de jouer.